La Pointe du Percho : un site néolithique puis une batterie militaire
En empruntant le sentier côtier sur la ‘Grande Côte’, et après avoir dépassé la pointe de Beg en aud en se dirigeant vers le sud, les pas du promeneur le mènent à la pointe du Percho. Il est loin de se douter que ce site a une très longue histoire.
En effet, cette ruine qui se découpe sur la falaise exposée aux embruns a remplacé fort tardivement un site préhistorique. En se baissant et en scrutant attentivement le sol bouleversé par des travaux d’aménagement, on découvre de nombreux éclats de silex. Ce site fait partie des nombreux sites néolithiques de la presqu’île.
Plus près de nous, La présence ponctuelle de navires, voire de flottes anglaises,[1] mais aussi les visites régulières de pirates essentiellement des Provinces-Unies[2] , provoquèrent chez les Secrétaires d’Etat à la Marine de Louis XIV la décision de construire sur les côtes de l’Océan Atlantique et en particulier sur la presqu’île de Quiberon, des batteries côtières.
[1] « Descente » de la flotte anglaise de l’amiral LESTOCK en 1746
[2] Les Provinces–Unies, officiellement la république des sept Provinces–Unies des Pays-Bas.
Historique de la batterie de "Beg en Aud " située sur la Pointe du Percho
Cet ouvrage n’est constitué que par un épaulement de grosses pierres taillées recouvert de terre et de gazon pour éviter les éclats de pierre provoqués par les tirs des assaillants. Dans cet épaulement sont ouvertes une ou deux embrasures pour y placer les canons. Ceux-ci sont servis par des hommes du pays, vraisemblablement ceux qui habitaient au plus près.
1° décembre 1744, le comte de MAUREPAS accorde une première somme pour faire restaurer la batterie. (SHL – Série E)
En 1746, le comte de MAUREPAS demande d’effectuer des réparations sur la batterie. (SHL – Série E)
1771-1785 – Relevé par les services hydrographiques de la Marine, la batterie n’apparaît pas sur la carte.
Le 7 frimaire an IX (1801), un rapport du général du génie DAMBARÈRE fait l’état de l’armement des batteries et fortifications de la presqu’île de Quiberon. La batterie de « Beg N Aud » [NDLR : le général veut parler de la batterie du « Percho »] est équipée de 2 canons de 12 [3] (ADM – RB-art.2780)
1803 – La batterie est équipée de 2 bouches à feu servies par 10 hommes. (ADM-R-951)
2 septembre 1810 – Direction de Nantes – Batterie nouvellement établie – 2 pièces de 8 [4]. Cette batterie croise ses feux avec le fort Penthièvre [5]. Elle protège les deux petites anses de Runaron [6] et de Portivy. Approvisionnée en munitions par le fort. Il est nécessaire de construire un corps de garde pour 10 hommes et un magasin d’artillerie. Batterie de 2° catégorie.
En 1852, la batterie est abandonnée.
Le 7 juillet 1857, la batterie est remise à l’administration des Domaines pour être vendue. Un plan en est dressé par le capitaine du Génie de Vannes et signé par la Direction de Brest. Il n’y a pas de corps de garde. (ADM Q504-Boite 20 – cote provisoire)
En 1875, la batterie est mise en vente. (ADM – RB-art.2780)
La batterie d’une contenance de 1.480 m² est enclavée dans le n° 996 section B du cadastre appartenant à la commune de Saint-Pierre
[3]Le canon de 12 livres est une pièce d’artillerie tirant des boulets de 12 livres, utilisée au XVIII e et au XIX e siècle.
[4] Le canon de 8 livres est une pièce d’artillerie tirant des boulets de 8 livres, utilisée au XVIII e et au XIX e siècle.
[5] Construit après la « descente anglaise de 1746 »
[6] Actuellement Renaron
Le champ de tirs de Kergroix
Au début du XX° siècle, le champ de tirs de Kergroix est aménagé. Il doit permettre aux artilleurs de forteresse de venir s’entrainer sur des canons de gros calibres, montés sur wagons (plusieurs dizaines de tonnes).
Sur la photo ci dessous on peut voir les mâts des antennes radio qui ont remplacé les transmissions optiques (décrites plus bas dans cet article)
La maison sur la pointe du Percho était un poste de transmission
Vraisemblablement vers 1904 un poste de transmissions est construit sur la pointe du Percho.
Nous sommes bien loin d’un corps de garde ou d’une maison des douaniers évoqués par certains guides touristiques !
Ce poste est équipé en personnel par des sapeurs télégraphistes du 24ème bataillon du Génie du Mont-Valérien. Ceux-ci, d’après le texte d’une carte postale, sont logés dans un hôtel restaurant à Portivy. Ils sont en liaison par fil avec le champ de tir de Kergroix et reçoivent par télégraphie optique (quand il n’y a pas de soleil , on utilise l’acétylène) leurs missions de Port-Louis. Ils sont également en liaison avec le fort Taillefer à Belle-Île et le fort de Surville à Groix pour les comptes rendus de tirs. Ceci explique les fenêtres orientées.
Les fenêtres du poste étaient orientées pour les transmissions vers Belle-Ile et Groix comme indiqué sur ce plan
A l’arrivée de la TSF les moyens seront modernisés, et le poste perdra de son intérêt ; il continuera à être utilisé au moins jusqu’à la fin du premier conflit mondial et sera désaffecté. Une belle page de l’artillerie de gros calibres se tournait.
La maison sur la pointe du Percho en 1922, devenue un site de promenade
Commentaires de KER1856
Selon Dominique Hillion, cette maison n’aurait jamais été un observatoire, bien qu’elle figure sur un plan de 1951 ou sur une carte postale sous cette appellation. Elle porte aussi l’appellation de maison des douaniers sur d’autres plans mais ne semble pas avoir eu cette fonction.
KER1856 remercie vivement Dominique Hillion pour cet article, très intéressant, qui nous apportera une vision différente de la pointe du Percho, lors de nos promenades sur la côte sauvage de Saint Pierre.
5 Responses
Super article très intéressant, avec toujours un petit mystère résistant sur cette maison que nous aimons tant mais qui chaque année se détériore un peu plus . En voie de disparition ?…Comme l’arche de Port Blanc.
Merci pour ces infos .
Bonne journée
Cordialement
Et pourquoi Saint Pierre et Quiberon ne font pas de restaurations de ces deux sites ???
Je trouve dommage que cette construction se dégrade au fil du temps. Sur la Ria d’Etel, les maisons des îlots de Nichtarguer et Nohic ont été rénovées (celle de Nohic grâce à un financement participatif, sauf erreur). J’ose imaginer un tel montage pour rénover celle de la pointe du Percho et qui redonnerait son lustre à cette bâtisse…
Elle se détérioreta encore plus vite avec des bandes d’imbéciles qui montent sur les murs pour se faire prendre en photo. J’ai « engueule » un groupe il y a un an. Mais rien n’y fait… je ne suis pas flic. La prochaine fois, je prends discrètement une photo et je la diffuse sur « les amis qui aiment Quiberon » sans leurs consentements bien sûr.
Sinon, merci, j’en ai appris beaucoup
Très bel article à travers les âges et les missions de cette pointe du Percho. Je suis également de ceux qui souhaitent la remise en état de cet édifice qui est un point marquant de l’histoire de la commune. Merci à monsieur Hillion et à toute l’équipe de KER 1856.