Souvenirs d’après guerre

Extrait de l'article

Yvonne Ollivier (née en 1927) et son frère René Le Pennec (né en 1936) se souviennent de la vie après guerre. Cet article est la suite de https://www.ker1856.bzh/une-jeunesse-a-keridenvel

Participants à la rédaction de cet article

Les entretiens d’Yvonne Ollivier et René Le Pennec ont été :
Réalisés par Valérie Kermorvan / Marine Jozan et Gaël Le Bourgès /Françoise Pichon
Transcrits par Jean-Louis Guého et Françoise Pichon
Cet article a été rédigé par Françoise Pichon .

Copie des images et textes interdits sans l'autorisation de KER1856

Cet article est la suite de notre article : https://www.ker1856.bzh/une-jeunesse-a-keridenvel

Les Bals

Une grande distraction des jeunes villageois est d’aller danser au bal. 

« J’aimais bien aller voir les gens danser au bal, je me souviens du père SAVI dansant le charleston. J’allais au bal à Roz’Avel, quand ceux de Carnac arrivaient il y avait de la bagarre, et parfois avec les militaires qui étaient au Fort de Penthièvre ; le bal n’était pas cher on ne payait que l’entrée » dit René. 

Le Roz’Avel en 2007 avant sa destruction

« On allait au bal à Roz’Avel, chez LESCOUET, le père à Francis LESCOUET, il jouait de l’accordéon on l’appelait « Pouet-Pouet » 

« J’allais à pied jusqu’à Carnac plage, j’ai dansé avec Alain BELLEC [1], c’était à la Casbah ».

« Une fois on était à Penthièvre, il pleuvait à seaux, il y avait un gars de la Trinité, il ne voulait pas nous ramener avec sa voiture, il avait de l’essence pour aller, pas pour revenir, Marcel PERRINOU a dit : j’ai un bidon chez Armande LE BOURGES, il a réveillé Armande pendant la nuit pour avoir son bidon, il a pu nous ramener et rentrer, Marcel avait toujours un bidon chez Armande en cas de besoin, raconte Yvonne» .

« On allait à pied, une fois je suis allée au carnaval à Plouharnel, puis au carnaval à Carnac, revenue danser à Plouharnel et rentrée à pied, Monsieur PORCHER, chez qui je travaillais, me raconte qu’en passant en voiture avec son fils il a vu une bande qui marchait à pied, ben si j’avais su que c’était vous, vous nous auriez ramenés ».

Les mariages

Photo du mariage du beau-père d’Yvonne : François Ollivier. A l’époque, les mariages étaient en général en costumes bretons.

Dans les années 50 -60, le bal est l’occasion de rencontres qui mènent au mariage mais plus souvent les liens se nouent lors de mariages dans la famille.

Yvonne : « Mon frère René, a rencontré sa femme par des gens de la famille, mon père et ma mère aussi ».

René : « A l’époque les garçons de Keridenvel se mariaient avec les filles du village, on se retrouvait le soir, on discutait » .

Yvonne : « Moi je me suis mariée dans le village, et dans les années 50 au moins 10 autres couples se sont mariés entre gens de Keridenvel », « Les THOMAS, Jean DAGORN et Lucienne THOMAS, Jacques THOMAS et Simone DAGORN, Yvonne THOMAS et Louis Le PENNEC, Jeannette DAVID et Mathurin Le BLAY. ».

Mariage d’Yvonne Le Pennec et Pierre Ollivier en 1955

« Je me suis mariée le 19 décembre 1955, il faisait beau, comme on voit sur la photo, il y avait Jean-Michel KERVADEC, Louis Le QUELLEC, Vonette BIHAN ».

« Mon mari, Pierre OLLIVIER, né à Ploemel, était dans la Marine Nationale. Il était parti presque trois ans en Indochine, j’ai attendu qu’il revienne pour me marier, il a fait 16 ans de Marine Nationale, après il a fait la pêche pendant 15 ans ».

Pierre Ollivier comme beaucoup était mousse très jeune.
Pierre Ollivier et le bateau Le Bihan

Les fermes et les cafés à Keridenvel

Yvonne « Il y avait trois débits de boissons à Keridenvel : la mère CLOAREC au bout de la route, HEMERY ET GUILLEVIC ».

« Il y avait des fermes, chez EVENO, c’était au moins 7 ou 8 vaches ; chez DAGORN trois ou quatre. Dans toutes les maisons il y avait une ou deux vaches. Chez nous on avait une vache, on élevait un cochon tous les ans, une année on a même eu une biquette, les poules couraient dans tout le village ; on cultivait des pommes de terre, des carottes, des artichauts, des choux-fleurs ».

René  : « Il y avait beaucoup de champs et peu d’arbres. On ramassait le goëmon pour fumer les champs. On voyait des vagues d’étourneaux le matin, en vol pour Belle-Ile qui s’arrêtaient sur le goëmon pour manger les vers. Les gamins fabriquaient des collets avec du crin de cheval (pas de jument) et un morceau de bois, pour les attraper et les manger. Il y avait des hirondelles par centaines, qui faisaient leurs nids sous les toits. On n’en voit plus. Il y avait des marsouins dans la baie qui mangeaient la tête des seiches. Le reste s’échouait sur la plage et les gens les ramassaient pour les manger»

Des vies de travail

Yvonne : « Après la guerre, je suis partie travailler à Nantes, chez les PORCHER, qui tenaient un magasin dont le nom était Cuirs et Crépins, Place de Bretagne », rapporte Yvonne.

Ils venaient ici (Saint-Pierre Quiberon), toutes les semaines et deux mois l’été ; j’allais partout avec eux. « A Paris, huit jours à Belle-Ile, j’étais comme de la maison ».

« J’ai appris à jouer aux cartes avec la patronne. J’ai même joué aux cartes avec la générale ZELLER qui était en vacances chez eux ».

A Saint-Pierre, ils avaient la maison de RICHARD, l’ancienne pharmacie. Il y avait plein de trucs chinois là-dedans. Même un costume entier de Samouraï avec le casque, plein de nacre. Ils me l’avaient donné, je ne sais pas où il est, il a dû aller à la poubelle… La marraine de Madame PORCHER lui avait donné son bien, une maison, le grand terrain où est le parking du Celtic.

Après j’ai travaillé trente ans chez MOUATI à Saint-Pierre, c’est pareil j’étais comme chez moi. J’ai même mangé avec un ministre, parce que Monsieur MOUATI était administrateur aux Colonies, puis Directeur de la Caisse Centrale de Coopération Economique. Plein de ses amis venaient et Monsieur COSSET, la grande maison COSSET près de chez Le PENNEC, c’était des amis et c’était un ministre sans portefeuille (ça existait à l’époque) [2].

Les enfants MOUATI étaient grands. Il y en a une, Marie-Christine qui a acheté une maison à Portivy, les petits enfants viennent encore me voir. Monsieur MOUATI venait souvent, il est venu manger chez nous. J’ai continué à faire des ménages pour les uns, les autres, jusqu’à 85 ans, je suis toujours là, « le travail ne tue pas ». 

René : « J’ai fait l’école maritime à Port Haliguen. J’ai été marin du commerce pendant sept ans, mais j’étais cafardeux de partir ».

J’ai travaillé à la Caisserie, là où est maintenant le Centre Culturel. C’était un très haut bâtiment, il restait encore des cuves où avant il devait faire l’alcool, quand c’était la distillerie. La Caisserie, faisait des caisses pour mettre le poisson, c’était NABAT. Puis ça été fermé des années.

J’ai travaillé aussi pour la Coopérative des huîtres, ils utilisaient le naissain naturel de la baie, après ils ont fait venir le naissain. J’étais gardien au parc à huîtres, je logeais dans un ancien camion sur la falaise. C’était un groupement de pêcheurs et d’ostréiculteurs, le directeur était de Carnac. Ça n’a pas duré, il y a eu les étoiles de mer qui mangeaient les huîtres, le problème des rejets de l’abattoir, et puis trop de pêche ils ont détruit la ressource. Après j’ai travaillé 40 ans à « la Quiberonnaise ».

Mais la vie sociale du Village dure toujours

Yvonne se souvient, peut-être grâce aux photos qu’elle a conservées, d’une sortie avec les cinquantenaires « il n’y en a plus beaucoup »

De gauche à droite :
1 M. RIVALLAN – 2 M. SÉNÉCHAL – 3 M. OLLIVIER – 4 Pierre LECHAT – 5 Mme LECHAT – 6 Armand GIQUEL – 7 Suzanne GIQUEL – 8 M. Le MAIRE – 9 Hélène Le BLAYE – 10 Mme RIVALAN – 11 Job Le FALHER – 12 Yvonne OLLIVIER – 13 Anne Le FALHER – 14 Roger MOIGNOT – 15 Paul CARADEC– 16 Mme Le MAIRE – 17 Augusta Le DÉORÉ – 18 Eugène RIO – 19 Louisa MOIGNOT – 20 M. MALICOT – 21 Mme MALICOT – 22 Mme CARADEC

 « RIVALAN et sa femme, MOIGNOT et sa femme, MALICOT et sa femme, Gégène ( Eugène) RIO, LECHAT et sa femme, GUITA qui travaillait à la mairie, SENECHAL du Rohu, mon mari et moi, Job Le FALHER et sa femme, Armand GICQUEL et sa femme, Léon LEMAIRE et sa femme, pour nos 50 ans on avait fait un repas à Saint Nicolas des Eaux ». Elle se rappelle aussi avoir fait des rallyes avec les amis, Georgette BURE et Irène RIO, pendant lesquels elles ont mangé près de Questembert et d’autres activités de loisirs.


[1] Véritable nom d’Alain BARRIERE auteur, compositeur, interprète, né à La Trinité en 1935, décédé en 2019

[2] « C’était sans doute quelqu’un d’important, mais on ne trouve pas mention de lui comme ministre ».

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