Depuis le XIXème siècle, les habitants du « quartier » de Saint Pierre[1] dans la presqu’Ile de Quiberon vont entamer de longues batailles afin de créer d’abord, une paroisse, puis une commune au nord de la presqu’Ile distincte de celle de Quiberon. Cette séparation sera dans un premier temps d’abord « religieuse ».
La séparation « religieuse » une longue histoire de 1768 à 1844
1768 : une première requête auprès de l’évêque de Vannes
C’est en 1768 que par un acte devant notaires à Auray en date du 26 septembre que les Frairiens[2], habitants du village de Saint Pierre dans une requête adressée à l’Evêque de Vannes par l’intermédiaire du Sieur Olivier Le TOULLEC, procureur en charge de la chapelle de Saint Pierre demandèrent à ce premier, d’avoir en cette chapelle un tabernacle pour accueillir le « Saint Sacrement » au vu que :
« le bourg paroissial est à une distance considérable et prive les dits habitants du secours spirituel et des sacrements surtout dans les temps de maladie ou de mauvaise saison ».
Les habitants de Saint Pierre s’engagent à entretenir à la chapelle de Saint Pierre : « un tabernacle décent, un ciboire doré en dedans, et une lampe toujours ardente devant le saint sacrement. Nous déclarons avoir nulle intention d’ériger ladite chapelle en trêve, et nous renonçons pour le présent et pour l’avenir à toute prétention d’en faire une trêve ou succursale ».
Pierre GUÉGAN, recteur de Quiberon consens à l’établissement d’un tabernacle à la chapelle de Saint Pierre, aux conditions portées au présent acte.
La requête des « futur saint-pierrois » est accordée en octobre 1768, par Monseigneur Charles-Jean de BERTIN évêque de Vannes, afin d’établir un tabernacle en la chapelle de Saint Pierre étant entendu que cela ne créait pas une nouvelle paroisse…
1844 : création de la paroisse de Saint-Pierre
Une lettre est adressée au conseil municipal de Quiberon le 4 septembre 1842 (ainsi qu’au préfet du Morbihan) par les habitants de Saint Pierre argumente qu’au vu de l’accroissement de la population du dit quartier il faudrait agrandir la chapelle de et ils reprennent les arguments de 1768 à savoir la distance importante, les intempéries etc. empêchent ceux-ci de suivre les offices. De plus, le dit quartier de Saint Pierre a les ressources nécessaires pour subvenir à l’entretien de deux vicaires ?
Refus du conseil municipal de Quiberon.
Demandes renouvelées les 6 novembre 42 et 29 janvier 43 – nouveau refus.
Le 7 février 1844 une lettre est adressée au Ministre de la justice et des cultes[3] par l’Evêque de Vannes et le sous-préfet demandant le déplacement d’un vicaire de Locmaria[4] à la chapelle de Saint Pierre afin de créer une paroisse.
Le conseil municipal de Quiberon consent à ce déplacement.
Lorsque la paroisse de Saint Pierre est créée les habitants des villages du nord[5] de la presqu’Ile adoptèrent celle-ci comme paroisse.
La séparation de la presqu’ïle en deux communes distinctes
Ayant obtenu gain de cause coté religieux, les paroissiens de Saint Pierre continue la lutte côté « civil » ; les mêmes arguments sont employés, la municipalité de Quiberon ne s’occupe pas d’eux…
Le 30 novembre 1850 un groupe de futurs saint-pierrois emmené par Amédée Le TOULLEC et Abraham JOURDAN adresse une « pétition » au préfet du Morbihan signée par cinquante-neuf habitants qui demandent la séparation d’avec la commune de Quiberon et la création d’une nouvelle commune ! Cette pétition au Préfet parvint au Ministre de l’intérieur[6]. La bataille ne faisait que commencer, elle durera six années ! Un conseil syndical est créé à Saint Pierre celui-ci poursuivra la bataille.
Bien sûr la municipalité de Quiberon n’acceptait pas la scission – refus au conseil municipal le 17 juillet 1851 – même refus le 13 mai 1855. Le Conseil d’arrondissement soutient la mairie de Quiberon. Les futurs saint-pierrois font appel au Conseil d’Etat qui rend un avis défavorable. Ils en appellent à l’Assemblée Départementale qui demande au Préfet d’insister auprès du Ministre de l’Intérieur ! Fin de l’année 1855, le Conseil Général renvoie le dossier au Conseil d’Etat qui enfin donne un avis favorable et le dossier peut enfin poursuivre sa route afin de faire établir une loi qui sera soumise aux deux chambres que constitue le Parlement. Entre temps la République est devenue le Second Empire.
Le texte de loi est signé du corps législatif le 14 mai 1856. L’Empereur Napoléon III signe le texte de loi le 13 juin 1856 instaurant la commune de Saint Pierre et qui sera publié au bulletin des lois.
Les maires étaient alors désignés par le conseil départemental qui choisira au sein du conseil syndical : Monsieur Joseph, Marie GUILLEVIN qui sera le premier maire de la nouvelle commune de 1856 à 1868.
La commune de Saint-Pierre est devenue en 1957 Saint-Pierre Quiberon.
[1] Ancien village de Guernevez – le village nouveau
[2] NDLR : Typiquement breton, la frairie était à la fois une division territoriale d’une ancienne paroisse, une communauté de travail entre les habitants de cette partie de la paroisse et une assiette administrative pour la répartition et la perception des impôts (tailles, corvées etc.). Un Frairiens était un habitant de cette partie de paroisse.
[3] Nicolas Martin du Nord
[4] Paroisse de Quiberon
[5]Kerhostin-Portivy-Renaron-Rocquenaud-Keraud-Kerdavid-Kermahé-Kerbournec-Keridenvel-Kergrois-Kervihan-Kerboulvin et le Rohu.
[6] Le Duc de Morny cousin de Louis Napoléon Bonaparte Président de la République.